lundi 17 décembre 2012

Quand des notes naissent du bois de mains non musiciennes, quand un arbre vibre avec des musiciens et des plasticiens, ce n’est pas la fin du monde mais Pastel qui propose une rencontre atypique avec José Lepiez et ses Arbrassons par Dominique Regef.
À quelques jours de l’hiver, Emile Maux est d’humeur celto-parasolaire et les chroniqueurs nous font voyager d’Andalousie à la Provence, en passant par Paimpol…

José Lepiez et les Arbrassons - entre terre et ciel

propos recueillis par Dominique Regef


Maclura et Lune de cèdre
Ces instruments – sculptures, "découverts" par José Lepiez en 1997, étonnent tous ceux qui les ont vus et écoutés de près. "Instruments à caresses", ils produisent des sonorités profondes et aériennes, qui échappent à toute classification, et nous emmènent dans un monde musical au plus proche de la nature, donc de l'humain. C'est aussi l'histoire d'une aventure passionnante, contée par José Lepiez et sa compagne et complice Patricia Châtelain.

Le bulletin d'humeur



« Je sème à tout vent ».

Contrairement à une opinion fort répandue, cette devise, emblématique du « Petit Larousse Illustré », n’est pas due au grand séducteur Giacomo Casanova, violoniste, écrivain, magicien, espion, diplomate, bibliothécaire « Vénitien » (1725-1798),
mais à Émile Reiber, architecte et décorateur français (1826-1893).
(Et dire que personne ne s’en doutait… sacré Émile !)


N’avez-vous jamais rêvé de vacances et de ciel bleu, d’un paradis où votre parasol trônerait solitaire sur une immense plage de sable fin, un fond de bruit de vagues berçant une douce somnolence… Puis un quidam se pointe avec armes et bagages et plante son parasol, certes loin de vous, mais il en vient un autre qui plante le sien, plus tard un autre fait de même et d’autres, d’autres encore… une armada de parasols qui s’approchent, s’approchent et transforment votre Éden solitaire en citée HLM des années 60. La jonction de leurs corolles pourrait être une limite naturelle, décente… Que nenni ! Les intrus n’hésitent pas à incliner leurs parasols, à chevaucher le vôtre, et, au besoin, à déplacer votre serviette de bain !
Un cauchemar fait de promiscuité et de bruits, un monde primitif… the wild beach of umbrellas lawless !
D’où le « Paradoxe du Parasol » : « Indépendamment du lieu et du contexte, il reste toujours assez de place sur une plage pour y planter un parasol. » 
Quel rapport avec la musique ou la danse… ?

Las simples cosas - chronique CD

Ce CD n'est pas pour moi une découverte, mais une confirmation. L'entretien que j'avais eu avec Guillaume Lopez 1  m'avait déjà révélé un jeune artiste d'une grande maturité, autant musicalement qu'humainement, si tant est que ces deux qualités soient dissociables. Puis j'ai assisté au concert donné  le 26 septembre au Mandala à Toulouse à l'occasion de la sortie de cet album, et il m'a paru de toute évidence et de toute nécessité d'en dire quelques mots. Car pour moi la véritable découverte s'est faite ce soir-là, je veux parler de Guillaume en tant que chanteur, littéralement visité par le duende, remontant à la source vive de ses origines hispaniques, à travers une histoire familiale commune à tant de réfugiés de la guerre civile, et insufflant une énergie et une émotion nouvelles à ces chansons apprises de son grand-père José Lopez, dont on entend la voix à la mi-parcours de ce CD, comme un hommage à la mémoire de ces innombrables personnes anonymes, à l'humanité transcendée par les épreuves du combat et de l'exil.

Chants en francoprovençal de Rhône-Alpes - chronique livret + 2 CD

Il y a dans cet ensemble d’un livret de 64 pages et de deux CD la possibilité d’un triple plaisir…
En premier, un plaisir de langue et pardonnez-moi si je l’évoque d’abord mais il fut d’abord le mien et, avant même d’écouter les deux CD, il me vint à la lecture de textes entièrement transcrits et entièrement traduits en français. On y découvre donc le « francoprovençal de Rhône-Alpes », celui qui est parlé le plus au nord de son aire… Mais le plaisir de la langue ne tient pas pour moi à cerner ce qui serait un particularisme mais plutôt de passer, d’une chanson à l’autre et donc d’un texte à l’autre, d’un particularisme à l’autre. On peut ainsi prendre un plaisir d’excursionniste explorant une région pour y apprécier la diversité des pentes de coteaux, des couleurs de talus. Ne serait-ce pas là le plaisir de parcourir un atlas ? Un atlas qui ne procurerait pas que de la connaissance, comme l’utilisation scolaire le laisse parfois entendre, mais aussi un réel plaisir. Plaisir qui peut aller jusqu’à l’herborisation buissonnière et la découverte de véritables spécimens, ces mots d’une ruralité active avec laquelle de moins en moins d’entre nous sont en contact : trékéla est ici le maïs, ponchon le tonneau, barotta la brouette, chioura la chèvre, bracon l’attelage…

lundi 12 novembre 2012

En novembre, il est question des musiques des mots et des mots en musiques de Philippe Sahuc et Jérôme Cabot en Couserans. Retrouvez également la chronique d'Escales, le CD de Sophie Cavez & Baltazar Montanaro, par Alem Alquier. Bonne lecture !

Babel Bazar en Couserans

par Jérôme Cabot et Philippe Sahuc

Il existait en Couserans un projet culturel de pays : faire se rencontrer la diversité des façons de faire de la musique, traditionnelle ancienne, traditionnelle récemment inventée, contemporaine de tradition, contemporaine de traduction, et même contente et reine de trash diction. L'animateur de ce projet a eu envie que l'expérience se prolonge en introduisant un miroir... Il a pour cela associé un duo tarnais de pneuma-zeugma-rockers, Double Hapax, et un singulier des littératures écrite et orale, Philippe Sahuc Saüc. Pour une rencontre en quatre points de chute sur un an, une fois par saison, en commençant par le printemps, comme il se doit. Mais voilà, le miroir ainsi constitué a non seulement saisi le reflet mais s'est vite délecté de la mise en abîme du genre : je musique que je dis que je musique que je dis que je musique...

Escales, Sophie Cavez & Baltazar Montanaro - chronique CD

Le violon et l’accordéon diatonique sont les espèces les plus répandues dans le biotope trad. À l’opposé, le uillean pipe, par exemple, compte peu d’adeptes en France ; dès lors il paraît plus facile pour un piper de sortir du lot. Quant aux autres (les joueurs des instruments les plus répandus), il faut bien faire du chemin, travailler dur, ne jamais s’avouer vaincu…

lundi 24 septembre 2012

Pour cette rentrée, Pastel vous propose un bouquet de chroniques de différents CD (et un DVD) de création, de re-création ou d’archives, avant d’alimenter dans les mois qui viennent les rubriques Langages, Itinéraires et Recherche.
Bonne lecture et bonne rentrée !

TRES - chronique CD

TRES (« Trois » en occitan) est un groupe clairement orienté « chants à danser » – même si quelques-uns de l’album ne le sont pas forcément – et qui gravite autour de la voix de Marianne Evezard. Nous avons là affaire à de véritables virtuoses : Basile Brémaud restitue magistralement une tradition violonistique auvergnate, tandis que Jéròme Liogier Elsener roule une vielle limpide et efficace. Hervé Capel donne du rythme à l’ensemble par son accordéon chromatique, mais pour moi se borne trop souvent à ce rôle d’accompagnateur, même si parfois on sent que c’est pour mieux décomposer telle cellule rythmique ou pour introduire telle harmonie inattendue, tirée certainement d’une culture jazz…

Pistes recyclables, Boris Trouplin - chronique CD

Boris ne fait plus peur à ses admirateurs en jouant de la cornemuse tout en enfourchant un vélo lancé à toute vitesse, comme dans son précédent CD. Il se contente, au niveau du graphisme et des textes de la pochette, de nous intriguer avec une curieuse spirale qui se déroule quand on l’ouvre, puis de nous offrir quelques instants de réflexion avec les titres énigmatiques, qui se révèlent dès qu’on les prononce à voix haute (Hash de zoo, Echec aimable, Mon double s’lâche, Le sourd aime huer)… enfin, qui se révèlent… presque tous, car j’ai abandonné l’idée de tout décrypter, il n’y a peut-être rien à comprendre, d’ailleurs, avec certains autres titres, tels La routine du Karma, Outres athlétiques ou Le pastiche de Lascaux ? J’ai même essayé en vain les contrepèteries…

Jaufré Rudel Troubadour de Blaye, Ensemble Tre Fontane - chronique CD

Le vielleux Pascal Lefeuvre et ses compères de Tre Fontane - Maurice Moncozet à la voix, au rebec, au saz et au ney, et Thomas Bienabe au luth - n’ont pas décidé de nous offrir un « best of » Jaufré Rudel, le troubadour blayais à la destinée romanesque, tombé amoureux de la comtesse de Tripoli sans l’avoir jamais vue, et qui serait mort dans ses bras après un long périple lui ayant permis de ne l’entrevoir que quelques secondes… La princesse lointaine n’est évoquée que dans le texte de présentation, puis l’auditeur est invité à une rencontre, située à mi-chemin entre l’Aquitaine et le Proche-Orient, en compagnie de Rudel et de quelques-uns de ses homologues, en les personnes de Marcabru, Guillaume IX d’Aquitaine, et Peyrol.

La bombarde et ses cousines - chronique DVD

La bombarde et ses cousines, tel est le nom d’un coffret de trois DVD édité par la Bodadeg Ar Sonerien (Quimper), une publication extrêmement copieuse avec au total six heures d’images, de musiques et d’entretiens. La bombarde, hautbois traditionnel emblématique de Bretagne – et donc de cette publication bretonne – occupe tout le premier DVD : on y trouve des entretiens portant sur son histoire, sur le jeu en couple avec le binioù koz, sur sa participation au bagad, mais aussi sur son utilisation actuelle hors des sentiers battus (notamment en duo avec l’orgue), « bombarde en liberté », « débridée ». Cependant, ce coffret est également consacré aux nombreuses « cousines », de France et des pays limitrophes tout d’abord (Occitanie, Pays basque, Catalogne, Italie), puis du Moyen-Orient (duduk, mey, balaban, hautbois à perce cylindrique d’Arménie, de Turquie et d’Azerbaïdjan, zurna de Turquie, mizmar d’Égypte), de Tunisie (raïta), du Niger (algaita), d’Asie du Sud, du Sud-Est et de l’Est (une multitude de hautbois d’Inde, de Thaïlande, Cambodge, Java, Chine).

ForrOccitània, Silvério Pessoa et La Talvera - chronique CD

Depuis le Pernambouc, Silvério Pessoa a souvent ramené ses musiques et le forró pour les associer au groupe occitan La Talvera. Ces rencontres, débutées en 2003, avaient fait naître un nouveau groupe sous le nom de ForrOccitània ; ce disque démontre que l’association a fonctionné sur la durée. L’intention est claire : faire parler les langues entre elles et faire jouer les musiciens ensemble.

Jean Perrier "Quand tu joues", Musique d'Aubrac - chronique CD

L’accordéoniste Jean Perrier enregistrait en 2006 un album consacré au répertoire de ses premiers bals, au début des années cinquante, entouré de Jean Bona à la cabrette et Bruno Bonte au banjo. Cet album n’a jamais pu arriver à sa fin : le musicien est décédé prématurément, laissant le projet inachevé. Jacques Lanfranchi, responsable de la prise de son lors de ces enregistrements ultimes, y a joint et mixé ici sept autres morceaux extraits d’enregistrements plus anciens (1998 et 2004) de manière à compléter ce panorama d’un répertoire que Perrier possédait et interprétait toujours à merveille, à l’aube de ses soixante-dix ans.

Mescladis, José Roux - chronique CD

Cette autre production de l’AEPEM1 (Association d'étude, de promotion et d'enseignement des musiques traditionnelles des pays de France) montre la diversité des produits qu’elle propose : même si, comme celui de Jean Perrier, il s’agit de consacrer un album à un musicien à la lourde expérience, celui-ci diffère sensiblement de l’autre. Certes, José Roux, lui, est bien vivant, et a pu gérer le contenu de Mescladis du début à la fin… mais on n’aura pas l’idée de les comparer pour une telle raison ! Avec Perrier, ce sont les témoignages intacts d’une musique de bal. Ici, c’est un album un peu pédagogique, un florilège d’airs livrés pour la transmission, une leçon d’interprétation.

Chansons et musiques traditionnelles du bocage normand - chronique CD

Le quatrième volume de la collection Sources publiée par l’association La Loure est consacré aux chansons et musiques traditionnelles du sud du bocage ornais, un territoire de massifs boisés et de landes où se situent les communes de La-Ferté-Macé, Domfront, Bagnoles-l’Orme, au cœur du Parc naturel régional Normandie-Maine.

vendredi 20 juillet 2012

Une vie nouvelle s’offre à Pastel qui devient tout numérique. Pour inaugurer cette ère, la « musique à bourdon » selon Gaëtan Polteau, l’itinéraire musical de Guillaume Lopez, la chronique bilingue de Philippe Sahuc, les musiques traditionnelles au CRR de Toulouse, le compte-rendu des Journées de la Musette par Jean-Christophe Maillard, des chroniques CD et le bulletin d'humeur d'Emile Maux. 
Bonne navigation !

Transarchéomécanique - La Rantèla

par Alem Alquier

Pour cette Rantèla entièrement numérique, et inaugurant une nouvelle série, voici une sélection d’archéologues, de mécaniciens et de transcripteurs…

L’archéologie du son
Archeotronics, « la première émission consacrée à l'archéologie des médias sonores et à leurs manipulations ».
Le son du bébé qui pleure passé au logiciel AutoTune est complètement inédit ! De même que la « fusion » entre la Suite pour Violoncelle n°1, prélude, BWV 1007 de J. S. Bach et le Duo des antiquaires par Jean Poiret & Michel Serrault : il s’agit ici de l’application d’une invention de Roland Moreno (l’inventeur de la carte à puce) appelée Célimène (l’ancêtre de l’AutoTune, donc) : irrésistible…

mardi 3 juillet 2012

Le bal Brotto-Lopez - chronique CD

Tous les morceaux se dansent ! c’est la moindre des choses pour assumer ce nom d’album… sous-titré en fin de livret « l’album des 10 ans ». Et comme un achèvement symbolique (en l’occurrence une décennie) se doit d’être fêté, on n’a pas lésiné sur les moyens : nous avons là un disque d’une haute tenue, avec un foisonnement de participants, comme pour signifier une convivialité liée à l’objet même de l’enregistrement : le bal. Joan-Francés Tisnèr, Xavier Vidal (entre autres au trombone, mais oui !), les Baudoin, Éric Fraj, Guilhem Cavaillé, Camille Raibaud (magnifique duo d’impro aux violons - trop court - sur le titre 1 !)… et bien d’autres pas moins valeureux. Et tout ceci sans être bavard…

Folk off !, Kat ça-i - chronique CD

« Kat ça-i est [pour les Baudoin] un laboratoire d'expérimentation autour de leur pratique, une récréation publique basée sur le plaisir de se retrouver pour créer une musique ethnique, directe et efficace. Travailler du spécifique vers l'universel c'est savoir d'où l'on vient pour savoir où l'on va !1 »

Es contra ta pèl, Du Bartàs - chronique CD

« Chansons populaires mélodramatiques », est-il précisé sur le site de Du Bartàs … Mais sur un fond de « no future », Plantarem de pastèca, chanson hédoniste qui prône une décroissance décomplexée, donne l’ambiance du disque : les chansons à la gloire du nectar de Vitis vinifera et de la fête ne manquent pas, et une large place est donnée à la voix et au parler cru… les désormais six protagonistes de ce groupe ne se contentent pas d’être de sacrés instrumentistes… ils chantent tous.

Le bulletin d'humeur





« Je suis venu, j’ai vu, j’ai bien bu »
« Voyage en jurançonnais » in Commentarii de Bello Gallico,
Julius Caesar, vers 50 av. J-C
Consacré à une brève excursion vers le sud, ce chapitre aurait été censuré 
par des amanuesnis (copistes) soucieux de la Gloire de l’auteur et cette 
phrase remplacée par une version plus guerrière. [réf. nécessaire]


« …Accroupi sale et nu sur le sable d’un désert africain, les yeux plissés par la concentration, le petit homme grave l’os pénien d’un lion… »

Ça c’était il y a bien longtemps…, certains parlent de 25 000 ans, moi, je dis au moins trois numéros de Pastel.
Transmettre la parole, les idées ! Rêve entêté, illusion originelle tenace, d’os pénien en pierre gravée, papyrus, parchemin, papier… Ah ! Le papier ! Cette extraordinaire invention chinoise, trois siècles avant J.-C., transmise par les arabes à l’Occident à partir du VIIIe siècle. Fabuleux « P’tits papiers » en fibres de bambou, écorces de mûrier, lin, chanvre, coton, chiffons recyclés… papier de riz, ou d’Arménie ?
Mais voilà, écrire et transmettre un document nécessite des graveurs, des scribes, auxquels se mêlent parfois des scribouillards qui osent le modifier au gré de leurs humeurs, de l’air du temps… Chapeau bas devant l’édifiante exemplarité de notre citation !

jeudi 24 mai 2012

Tout part du bourdon

Un entretien avec Gaëtan Polteau

propos recueillis par Alem Alquier

Grande cornemuse à miroirs (ou « chèvre »)
Le parcours de musicien et d'enseignant de Gaëtan Polteau lui ont fait se poser de nombreuses questions et l'ont amené à chercher des réponses dans plusieurs domaines : répertoire, facture instrumentale, recherches historiques, etc.
Sa formation d'électronicien (BTS électronique : formation en électronique, mécanique et électricité), ses recherches en musées et bibliothèques (relevés d'instruments, lecture de traités et manuscrits, etc.), ses expériences en musiques Renaissance et baroque (notamment en hautbois et musette baroques), ses expériences de musicien et de pédagogue en musiques traditionnelles, sa grande curiosité et son travail en binôme avec Nicolas Rouzier1, lui permettent de créer la compagnie Amalthée2 et un atelier de facture instrumentale.
Son goût pour la transmission et l'enseignement lui fait adopter une réorientation professionnelle : titulaire du DE et du CA de professeur de musiques traditionnelles, il enseigne au Conservatoire à Rayonnement Régional de Limoges depuis 2005.

Il nous parle avec passion de sa vision des trois thèmes qui pour lui sont absolument indissociables : pratique musicale, facture instrumentale, formation... avec un maître-mot : la recherche.

lundi 21 mai 2012

Guillaume Lopez, nomade enraciné

propos recueillis par Dominique Regef


Guillaume Lopez - Celui qui marche
Guillaume Lopez apparaît aujourd'hui sur la scène occitane comme un repère incontournable par la diversité et l'originalité de ses initiatives musicales. Comme tant d'autres ici, il vit l'Occitanie comme une terre de mémoires croisées, de racines enfouies, qui n'ont de sens que dans la force du témoignage et dans l'offrande à tous les vents.


Quelle a été ta porte d'entrée dans la musique ?
À partir de l'âge de huit ans et pendant une douzaine d'années, j'ai étudié la musique classique à l'Ecole de Musique de Tournefeuille, en solfège et saxophone. J'ai appris la respiration, la technique, la lecture, quelques notions d'harmonie. Après j'ai découvert les musiques traditionnelles, un peu par hasard : j'ai la chance d'avoir dans ma famille Xavier Vidal, musicien, collecteur et formateur, qui est mon oncle. Depuis que je suis petit, à chaque repas de famille, on sort des instruments et on joue. Un jour, Xavier a joué du fifre : le coup de cœur ! J'avais treize ou quatorze ans. Il m'a alors offert mon premier instrument. Le déclencheur le plus déterminant a été, lors de mon passage en première littéraire au lycée, quand on m'a donné le choix, en matière optionnelle, entre mathématiques et occitan. C'est sur le conseil de ma professeur de mathématiques que j'ai opté pour l'occitan, une langue que je ne connaissais pas du tout, et que j'ai découverte assez facilement du fait que j'avais l'espagnol dans l'oreille puisque mes quatre grand-parents le parlent. Ma professeur d'occitan, Anne-Marie Parpet, donnait des cours englobant la langue, la littérature, la musique, la culture régionale... des choses que je n'avais jamais imaginées auparavant. J'ai eu une excellente note au bac, et j'ai continué à la fac en espagnol-occitan, où j'ai rencontré des gens qui parlaient occitan couramment depuis la tendre enfance. Dès la première année, nous avons monté un groupe de bal qui s'appelait Los d'enloc, c'est-à-dire "ceux de nulle part".

Lo Saüc - chronique bilingue

par Philippe Sahuc


Acabi de cavar ?
Pastel cambia. Ganhat pel Camp biò ? Fariá plasèr a tot un brave monde ! Mès enfin, cambia solament de jaç-otís, de biais de se cocar e de se durbir al lum… Sabetz, cap mès de fulhac, una tela de veire !
Alavetz, acabat de fulhetar, mès comença lo jòc de mirga. Uns dets se van pausar, cansats benlèu d'aver plan fulhetat, un punhet va trastejar e lo guinhaire dal cap, domdaire de mirga - e pas dromadari de miga - va clicar e clicar, talament que le podrem aperar lo clic-chon, del biais meteis que lo clarinetista de Bammala, amb eths sieus clapets, s'aperava e clichon…
Acabat de tornar de la pagina nau (coma cançon de nau1, pas causida per talastre !) a la pagina quatre (e pas per l'interdit dela cançon de nau contra la chifra de brusha) ! E alavetz, per cercar quicòm del costat de la marge ? La mirga que va matar la marge ? Que nani, la mirga que va cavar per trapar conneissença ! Amb uns clics, que pòt far tunèles ! E atal, se van bastir escalièrs de veire per lo Pastel nou… Coma dins unes contes que parlon, per s'acabar, d'un escalièr de veire2… Alavetz, tot que va s'acabar ?
Pensatz ala velhada antica… Aprèp un conte, un autre conte. Al Païs de Saut, la velhada s'acabava quand casiá l'agulha plantada ena candela3. Alavetz, lo Pastel nou s'acabara per vos quand caira l'agulha del comptador electric !

Fini de fouir ?
Pastel se fait biau. Conquis par le camp bio ? Cela ferait plaisir à tant d'honnêtes gens ! mais enfin, change seulement de lit-quête, de façon de se coucher et de s'ouvrir à la lumière… Vous savez, plus de feuillage, une toile de verre !
Du coup, fini de feuilleter mais voilà le jeu de souris qui commence. Certains doigts vont se reposer, fatigués peut-être d'avoir trop feuilleté, un poignet va s'activer et l'index d'extrémité, charmeur de mulot - et pas chameau de mots à l'heure - va cliquer et cliquer, tellement qu'on pourra l'appeler le Clic-chou, de la même façon que le clarinettiste de Bethmale, avec tous ses clapets, s'appelait le clit-chou…
Fini de revenir de la page neuf (comme une chanson de neuf1, pas choisie par hasard !) à la page quatre (et pas pour respecter l'interdit de la chanson de neuf contre le chiffre de sorcière) ! Et alors, il va se bâtir des escaliers de verre pour le Pastel nouveau… Comme dans ces contes qui parlent, pour se clore, d'escalier de verre2… Alors, tout va s'achever ?
Pensez aux veillées des temps anciens… Après un conte, un autre conte. En pays de Sault, la veillée ne s'achevait que lorsque tombait l'aiguille préalablement piquée dans la chandelle3. Aussi, le Pastel nouveau ne se terminera pour vous que lorsque tombera l'aiguille de votre compteur électrique !

Un département de musiques traditionnelles au sein du Conservatoire à Rayonnement Régional de Toulouse

par Xavier Vidal

La volonté de la municipalité de Toulouse et le travail conjoint du Centre occitan des musiques et danses traditionnelles Toulouse Midi-Pyrénées (COMDT) et du Conservatoire à Rayonnement Régional de Toulouse (CRR) ont permis la création, à la rentrée scolaire de septembre 2011, d’un département de musiques traditionnelles au sein de ce dernier. Le CRR propose donc désormais une formation de troisième cycle validée par le Diplôme d'Études Musicales. Ce DEM existe déjà dans d'autres conservatoires de la région Midi-Pyrénées (Aveyron, Grand Tarbes en Hautes-Pyrénées). Le domaine des musiques traditionnelles intéresse de plus en plus les conservatoires soucieux de prendre en compte toutes les esthétiques musicales et leurs spécificités pédagogiques, notamment, en ce qui nous concerne, l'oralité des musiques traditionnelles. En considérant les développements de la pratique amateur et professionnelle et de l’enseignement des musiques traditionnelles en région (au sein d’associations ou d'écoles de musique), un net besoin se faisait sentir de formation de musiciens qui puissent être des référents tant au niveau de la pratique que de la culture musicale.

Les Journées de la Musette, janvier 2012 à Toulouse - compte-rendu


Le projet couvait depuis plusieurs années… Il avait failli se réaliser à la Cité de la Musique à Paris, puis avait été rapatrié à Toulouse en 2010, pour finalement se concrétiser en janvier 2012. Pourquoi des Journées de la Musette ? Le Conservatoire à Rayonnement Régional de Toulouse avait déjà organisé, les années passées, les Journées du Hautbois, les Journées du Basson, et enfin les Journées du Luth : ce savoir-faire déjà ancien ne pouvait que paraître favorable. Les deux instruments à anche avaient d’ailleurs mêlé avec bonheur les instruments de diverses époques : hautbois renaissance, baroque, classique, romantique et moderne… idem pour le basson, avec en prime toutes les variantes actuelles que connaît l’instrument, sous ses diverses formes françaises (Buffet-Crampon, Selmer) ou sous celle du Fagott allemand, système Heckel. Le luth avait déjà beaucoup à faire entre le Moyen-Âge, la Renaissance et l’époque baroque. Quant à la musette, elle paraissait confinée dans un petit siècle couvrant les règnes de Louis XIV et Louis XV, se limitant aux frontières françaises…

Adara, Vox Bigerri - chronique CD


Par un beau matin de fin d’hiver, je reçois un OMNI (Objet Musical Non Identifié). Il s’agit du CD dernier-né de l’ensemble de voix d’hommes de Bigorre Vox Bigerri. Connaissant les lascars et appréciant leur travail, je ne tarde pas à l’écouter.
Tout de suite, la minéralité des voix est là. Le corps chante, vibre au travers des enceintes et je me replonge dans quelques soirées conviviales que j’ai eu l’occasion de vivre avec eux.

Toad - chronique CD

À l’écoute du deuxième album de Toad sorti en 2011, la première chose qui frappe est le travail effectué sur le son. Les musiciens de Toad (Yann Gourdon à la vielle à roue, Guilhem Lacroux à la guitare électrique et Pierre-Vincent Fortunier au violon et à la musette Béchonnet) s’emparent du son râpeux, plein et par moment dissonant qu’ils ont entendu dans les collectages d’Auvergne pour créer une musique à danser tendue, énergique et sauvage. Leurs instruments sont amplifiés afin d’intensifier les grincements et bruits des vielle à roue, cornemuse et violon et pour leur permettre d’agir directement sur le son par des effets tels que la distorsion ou le larsen. Ce second album, à l’instar du précédent, se sert donc des moyens techniques actuels pour produire un son directement inspiré de la musique traditionnelle.

Dançarem - chronique CD

Balayer le passé, le présent et le futur dans un seul CD est chose ambitieuse. L’équipe de l’Association pour les musiques de tradition populaire en Quercy (AMTPQ) ne semble pas effrayée par le projet.