mardi 23 décembre 2014

Lucilla Galeazzi et Manu Théron, deux grandes et belles figures emblématiques du chant traditionnel, artistes et passeurs que nous avons reçus en 2014, nous accompagnent en cette fin d’année sous les plumes de Sylvie Allix et d’Alem Alquier. Nous vous proposons également deux chroniques d’ouvrages consacrés l’un à la chanteuse lotoise Alberte Forestier, « chanteuse ordinaire et extraordinaire » collectée et accompagnée par Xavier Vidal et le second au très doué « Steve Vai de la vielle à roue » Romain Baudoin.
Nous vous souhaitons de passer de très bonne fêtes, et vous donnons rendez-vous en 2015 !

Quelques notes sur le stage de Lucilla Galeazzi des 18 et 19 octobre 2014

par Sylvie Allix


Photo Droits réservés
 « Ma mère, comme ses propres parents, était ouvrière à Terni. Aujourd'hui c'est la crise et dans les aciéries de Terni ce sont cinq cent cinquante emplois qui s'arrêtent... Les ritualités se perdent, on ne chante plus à la sortie de l'usine. Moi ? Et bien je suis devenue une ouvrière de la voix ». Voilà comment Lucilla ouvre l'atelier ce samedi-là. Nous sommes vingt prêts pour l'aventure. Un paquet de photocopies circule... Nous allons chanter tout ça ? 
       « Quel répertoire choisir quand tous les dix kilomètres il y a des chants différents, des nourritures différentes, des paysages aussi différents que le sont montagne et plaine... ? On me dit « les chants des montagnes sont tristes »... mais toi, essaye de vivre en montagne avec six mois de neige.... ». Effectivement... nous sommes confortablement installés au COMDT, pas de neige à l'horizon... pas de troupeau non plus. « Il faut bien prendre conscience du fait que les gens ont fait leurs supports musicaux avec ce que la nature leur donnait : pas de zampogna sans brebis. Sans compter les trouvailles vocales pour imiter les animaux, le concert d'un troupeau qui se déplace... » 

Actualité de Manu Théron - deux mille quatorze

par Alem Alquier


        Nous avions convenu de nous retrouver cette après-midi ensoleillée du mois de mars au bar du Matin, place des Carmes à Toulouse. Manu Théron était de passage dans notre ville avec Chin Na Na Poun.



      

1 Primate - chronique CD


        Romain Baudoin, volontiers promu « Steve Vai de la vielle à roue » en commentaires de YouTube, nous offre un album assez expérimental, où un instrument hybride est largement mis à l’honneur. Le morceau qui introduit l’album s’intitule Paret, certainement pour évoquer ce mur du son qui lui a inspiré la fabrication du double instrument vielle à roue alto / guitare électrique et qui a pour nom torrom borrom (« chaos » en gascon : sa prononciation entraîne l’onomatopée qui évoque un éboulement). La musique improvisée se nourrit d’instants, d’écoute pure, et surtout d’exploitation de l’immédiateté. Par exemple que peut-on faire de plus improvisé que l’exploration de larsens ? L’album en est (un peu) pourvu, et ici on en revendique l’esthétique. Est-ce une même sérendipité (titre du deuxième morceau) qui a conduit Romain Baudoin à inventer cet instrument ? Il faut préciser que son luthier Philippe Mounier est coutumier des prototypes et n’hésitera pas à ajouter dans le cas qui nous intéresse, outre des cordes sympathiques, des clapets qui permettent de monter ou de descendre la note jouée d’un demi-ton ; à supprimer le « plumier » pour un accès direct aux cordes et les faire moduler à loisir…

Voix traditionnelle d'aujourd'hui - chronique livret-cd



       Voici un enregistrement que chacun devrait posséder et sur lequel il faudrait s'arrêter longuement : la « toujours jeune et vibrante » Alberte Forestier, chanteuse à la fois ordinaire et extraordinaire, et son compère « caméléon de haute voltige » Xavier Vidal. Une chanteuse ordinaire car elle chante les chansons de toujours, de tous les jours, de chaque instant, pour danser, pour raconter, pour rire, pour exorciser ses peurs et ses peines, pour se rappeler le passé, pour se donner du « vam », du courage ; elle est un peu comme la voisine de tout le monde, mais elle est aussi une grande dame à la fois, tant elle a cultivé « lo biais », la façon de chanter et de conter. Extraordinaire donc aussi car sa façon de dire ces chansons, que certains préfèrent malheureusement lire dans des recueils du XIX°, est unique, limpide, généreuse et communicative. D'une simplicité si riche et « normale » qu'il est facile de passer à côté s'en se rendre compte de ce qui se joue dans ces sons, dans l'oralité qui vit et se déploie devant nous.