mardi 23 décembre 2014

Lucilla Galeazzi et Manu Théron, deux grandes et belles figures emblématiques du chant traditionnel, artistes et passeurs que nous avons reçus en 2014, nous accompagnent en cette fin d’année sous les plumes de Sylvie Allix et d’Alem Alquier. Nous vous proposons également deux chroniques d’ouvrages consacrés l’un à la chanteuse lotoise Alberte Forestier, « chanteuse ordinaire et extraordinaire » collectée et accompagnée par Xavier Vidal et le second au très doué « Steve Vai de la vielle à roue » Romain Baudoin.
Nous vous souhaitons de passer de très bonne fêtes, et vous donnons rendez-vous en 2015 !

Quelques notes sur le stage de Lucilla Galeazzi des 18 et 19 octobre 2014

par Sylvie Allix


Photo Droits réservés
 « Ma mère, comme ses propres parents, était ouvrière à Terni. Aujourd'hui c'est la crise et dans les aciéries de Terni ce sont cinq cent cinquante emplois qui s'arrêtent... Les ritualités se perdent, on ne chante plus à la sortie de l'usine. Moi ? Et bien je suis devenue une ouvrière de la voix ». Voilà comment Lucilla ouvre l'atelier ce samedi-là. Nous sommes vingt prêts pour l'aventure. Un paquet de photocopies circule... Nous allons chanter tout ça ? 
       « Quel répertoire choisir quand tous les dix kilomètres il y a des chants différents, des nourritures différentes, des paysages aussi différents que le sont montagne et plaine... ? On me dit « les chants des montagnes sont tristes »... mais toi, essaye de vivre en montagne avec six mois de neige.... ». Effectivement... nous sommes confortablement installés au COMDT, pas de neige à l'horizon... pas de troupeau non plus. « Il faut bien prendre conscience du fait que les gens ont fait leurs supports musicaux avec ce que la nature leur donnait : pas de zampogna sans brebis. Sans compter les trouvailles vocales pour imiter les animaux, le concert d'un troupeau qui se déplace... » 

Actualité de Manu Théron - deux mille quatorze

par Alem Alquier


        Nous avions convenu de nous retrouver cette après-midi ensoleillée du mois de mars au bar du Matin, place des Carmes à Toulouse. Manu Théron était de passage dans notre ville avec Chin Na Na Poun.



      

1 Primate - chronique CD


        Romain Baudoin, volontiers promu « Steve Vai de la vielle à roue » en commentaires de YouTube, nous offre un album assez expérimental, où un instrument hybride est largement mis à l’honneur. Le morceau qui introduit l’album s’intitule Paret, certainement pour évoquer ce mur du son qui lui a inspiré la fabrication du double instrument vielle à roue alto / guitare électrique et qui a pour nom torrom borrom (« chaos » en gascon : sa prononciation entraîne l’onomatopée qui évoque un éboulement). La musique improvisée se nourrit d’instants, d’écoute pure, et surtout d’exploitation de l’immédiateté. Par exemple que peut-on faire de plus improvisé que l’exploration de larsens ? L’album en est (un peu) pourvu, et ici on en revendique l’esthétique. Est-ce une même sérendipité (titre du deuxième morceau) qui a conduit Romain Baudoin à inventer cet instrument ? Il faut préciser que son luthier Philippe Mounier est coutumier des prototypes et n’hésitera pas à ajouter dans le cas qui nous intéresse, outre des cordes sympathiques, des clapets qui permettent de monter ou de descendre la note jouée d’un demi-ton ; à supprimer le « plumier » pour un accès direct aux cordes et les faire moduler à loisir…

Voix traditionnelle d'aujourd'hui - chronique livret-cd



       Voici un enregistrement que chacun devrait posséder et sur lequel il faudrait s'arrêter longuement : la « toujours jeune et vibrante » Alberte Forestier, chanteuse à la fois ordinaire et extraordinaire, et son compère « caméléon de haute voltige » Xavier Vidal. Une chanteuse ordinaire car elle chante les chansons de toujours, de tous les jours, de chaque instant, pour danser, pour raconter, pour rire, pour exorciser ses peurs et ses peines, pour se rappeler le passé, pour se donner du « vam », du courage ; elle est un peu comme la voisine de tout le monde, mais elle est aussi une grande dame à la fois, tant elle a cultivé « lo biais », la façon de chanter et de conter. Extraordinaire donc aussi car sa façon de dire ces chansons, que certains préfèrent malheureusement lire dans des recueils du XIX°, est unique, limpide, généreuse et communicative. D'une simplicité si riche et « normale » qu'il est facile de passer à côté s'en se rendre compte de ce qui se joue dans ces sons, dans l'oralité qui vit et se déploie devant nous. 

jeudi 25 septembre 2014

Ce mois-ci, Pastel explore le passé et sa permanence dans le présent : Philippe Sahuc nous emmène à la (re)découverte de la multiséculaire Fête du Papogay en allant à la rencontre de ses acteurs et Jacques Baudoin nous livre la seconde partie de sa recherche consacrée à la samponha, la trop méconnue cornemuse polyphonique du nord des Pyrénées. 
Alors, passé, présent... et futur ?


La samponha, la renaissance ?


En mai 2013, pour Pastel, Jacques Baudoin proposait une actualisation de ses recherches sur la samponha, la cornemuse polyphonique du nord des Pyrénées, voici maintenant la suite de ses travaux. Bonne lecture !


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Le Papogay - ne le laissez pas s'envoler...

Certains font des avions en papier, Philippe Sahuc préfère les oiseaux...

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vendredi 11 juillet 2014

Il y a des petites musiques de nuit, des petites musiques zen et il se dit même qu'il y a des petites musiques d'ascenseur... mais qu'en est-il du silence ? Tour d'horizon avec Alem Alquier.
À lire également deux nouvelles chroniques : 
Pifres par Jean-Christophe Maillard et Artús par Alem Alquier, ainsi que le compte-rendu de l'International Bagpipe Conference qui s'est tenue en Angleterre en mars, par Jean-Christophe Maillard également.


Musique relaxante, musique d’ascenseur, musique obligatoire

La Rantelà

par Alem Alquier

Il n’est presque plus possible de vivre en ville sans musique. Chaque magasin, chaque restaurant, chaque café a sa musique d’ambiance, même chez le dentiste… et ne parlons pas du métro ou des parkings souterrains, qui lorsqu’ils ne sont pas bloqués sur une radio insupportable, passent de la musique classique (qui commence à Vivaldi et s’arrête à Brahms pour le plus récent), censée apaiser… de quoi ? de la ville ? du stress  ? Les compositeurs du XIXe siècle se doutaient-ils qu’aux siècles prochains leurs œuvres seraient assimilées à de la thérapie ?

jeudi 10 juillet 2014

Pifres - chronique d'ouvrage

Xavier Vidal et Guilhem Boucher expliquent leur démarche dans un texte de présentation : à la suite d’une publication sur l’amboesa (cf. Pastel
n°67) et aux actions du collectif Fifres du Quercy, se ressent le désir de faire le point sur les connaissances un peu éparses autour du fifre, bien connu dans le Bazadais, un peu dans la région de Moissac et en différents autres endroits. Le mot pifre revient souvent dans les mémoires, de manière plus ou moins informée car sa signification est vague, ou parfois plus précise. Rassemblant les connaissances et compétences des amis, élèves ou connaissances gravitant autour d’eux, nos deux personnages décident alors de proposer ce document qui étend son domaine jusqu’au Massif Central, voire jusqu’au… Brésil, comme on le verra bientôt.

Artús - chronique CD

Cantaplora aurait pu être le titre cet album qui a préféré être éponyme. 
Les libertés prises avec le texte en montrent bien une des finalités : le recueil d’œuvres inédites de Manciet est un prétexte à mise en musique, et d’une manière magistrale (comme d’habitude chez Artús), et le thème de la cantaplora (la clepsydre ou chantepleure) y est invoqué de manière formelle. Hubert Cahuzac, qui a rassemblé les textes de Bernard Manciet, en explique le parti : « Une intention, une métaphore, un genre littéraire. Bernard Manciet y voyait un art de l’ellipse : de même que la chantepleure sert à prélever un petit échantillon de liquide depuis un vase contenant (comme le taste-vin, canne ou sonde pour une barrique, ou la pipette moderne en chimie), le texte d’une cantaplora doit rester court, une évocation, un fragment de scène plus large, sans récit à proprement dit. Ces quelques gouttes chantent et font pleurer d’autant plus qu’elles ne durent pas, et qu’il faut prolonger leur écoute par l’imagination. La rareté est parfois proche de la concentration… »

L’International Bagpipe Organisation : une affaire à suivre - compte-rendu

Au départ, l’International Bagpipe Organisation c’est un logo amusant et bien trouvé, et surtout une jeune cornemuseuse d’un dynamisme et d’un enthousiasme hors du commun : Cassandre Balosso-Bardin. Chercheuse en herbe (mais déjà affirmée), elle a enthousiasmé la Société Française d’Ethnomusicologie l’année passée par un exposé on ne peut plus convaincant sur ses travaux à Majorque. En même temps, elle enchaîne enquêtes de terrain, bals folk ou trad, organisation d’événements, et surtout – je suis là pour en parler – les colloques internationaux. Laissons donc notre amie Cassandre et penchons-nous un peu sur ces réalisations : le cosmos de la cornemuse est concerné, donc nous aussi…
Cassandre Balosso-Bardin

mardi 17 juin 2014

Lors de la dernière édition de Peuples et musiques au Cinéma, une table-ronde faisait suite à la projection d'Ango, une leçon de musique africaine en présence de Jérôme Blumberg et Simha Arom. Une conversation entre celui-ci et le public s'est engagée sur les spécificités de la musique des Banda-Linda, dont Jean-Christophe Maillard nous fait part. Retrouvez également deux nouvelles chroniques : Pep el Mal d'Eric Fraj par Philippe Sahuc et Cap aus sorelhs de Vox Bigerri par Jean-Louis Comoretto.

Rencontre autour du film de Simha Arom : Ango, une leçon de musique africaine

Festival Peuples et musiques au cinéma 2013

Simha Arom avec le réalisateur Jérôme Blumberg
à la Cinémathèque de Toulouse, novembre 2013
Dans le monde de l’ethnomusicologie, on ne présente pas Simha Arom. Il est l’un de ceux qui ont proposé une approche totalement nouvelle de cette science, y mêlant les principes de la linguistique héritée de Saussure à l’analyse musicale. Par ce biais, il a étudié avec une acuité impressionnante les systèmes musicaux de diverses civilisations, notamment ceux de l’Afrique centrale, et principalement des Pygmées, se penchant sur les polyphonies, les échelles, l’organisation temporelle, la modélisation et les aspects cognitifs de l’oralité. Pendant de longues années, il a dirigé des recherches au laboratoire LACITO CNRS (Langues et Civilisations à Traditions Orales), formant ainsi des générations d’ethnomusicologues. Simha Arom connaît bien Toulouse, et a participé récemment à diverses activités de recherche sur la polyphonie vocale à l’Université Toulouse – Jean Jaurés. Invité au dernier festival Peuples et Musiques au Cinéma, il est notamment venu présenter son film Ango, une leçon de musique africaine, sorti en 1998 en compagnie du réalisateur Jérôme Blumberg. Le film avait été conçu à l’occasion de la venue à Paris d’un de ces fameux orchestres de trompes des Banda-Linda de la République Centrafricaine, sur lesquels Arom s’est particulièrement penché, utilisant notamment la technique du re-recording lors de ses enquêtes de terrain, et découvrant ainsi le travail individuel de chaque instrumentiste pour l’élaboration de polyphonies d’une grande complexité. On le voit ici sur la scène d’un auditorium parisien, commentant devant un public d’étudiants la musique jouée par l’ensemble, superposant les voix l’une après l’autre, questionnant les musiciens, et proposant à l’auditoire une « leçon » particulièrement exceptionnelle pour de jeunes Parisiens découvrant les techniques de l’étude de terrain.
À l’issue de la projection, un débat permettait au public de Peuples et musiques au cinéma de poser des questions à Simha Arom, et de découvrir sa personnalité passionnante, faite d’une faconde, d’une érudition et d’un humour impressionnants. Nous reproduisons ici la première partie de cet échange, axé sur le film et les musiques entendues. Les questions sont posées par diverses personnes du public.

Pep el mal, Eric Fraj – chronique CD

Il y a au moins deux façons d’apprécier cet ensemble de musique – à savoir de chant, d’amorces sonores vocales et instrumentales – et de textes…
La première façon serait celle d’un auditeur-zappeur qui aurait à peine pris le temps de regarder la jaquette sépia avant de laisser s’engloutir le CD dans l’ordinateur… Quand l’écoute distraite commence, l’auditeur-zappeur – qui fait toujours autre chose en même temps – est pourtant tenté de fermer les yeux… Alors qu’il se préparait à découvrir le fruit d’un simple travail de mémoire, il est transporté d’une terre à une autre ! D’une plage sonore à l’autre, il a l’impression d’entendre de l’Espagne, de l’Argentine, souvent franchement de la Catalogne, et peut-être bien de l’Italie et peut-être encore autre chose... Avec, semble-t-il, toutes les sonorités d’accents, sinon de langues, qu’il faut pour évoquer d’autres pays ! S’ajoutent à cela des tonalités différentes, qui font que le voyage ne se contenterait pas de faire aller de terre en terre mais aussi de faire aller de moments en moments où les univers humains ne seraient pas les mêmes, tantôt intimes comme des espaces de confidence, tantôt profonds comme des espaces de célébration, tantôt âpres comme les espaces qu’on va devoir quitter ou bien ceux où l’on arrive, sans être sûr encore d’être accueilli…

Cap aus sorelhs (Face aux soleils), Vox Bigerri – chronique CD

Vox Bigerri nous amène « Face aux soleils ». Vous n’aurez pas besoin de crème protectrice mais d’une bonne paire d’enceintes.
Pour ce nouvel opus de Vox Bigerri, on peut sentir la chaleur des voix et cette minéralité qui vous prend et ne vous lâche que quelques temps après la dernière note. On met un certain moment avant de sortir des sonorités brutes. C’est la signature de Vox.

jeudi 10 avril 2014

Conte, violon, chant, Pastel fait la part belle aux sources et aux collecteurs avec un article de Josiane Bru consacré à Antonin Perbosc (instituteur et collecteur au début du siècle dernier) et deux chroniques, l’une par Xavier Vidal sur l’ouvrage Violon traditionnel, Dauphiné, Vivarais, Savoie de Patrick Mazellier, la seconde par Pascal Caumont sur la double publication (livre et CD) du CORDAE/ La Talvera Cançons del Cap del Pont.

Bonne lecture !



De la collecte à l’œuvre, les contes d’Antonin Perbosc

Par Josiane Bru

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Violon traditionnel, Dauphiné, Vivarais, Savoie, Patrick Mazellier - chronique

Nous connaissons les travaux de Patrick Mazellier, en tant que figure essentielle de la collecte et du renouveau des musiques de traditions populaires en France, et, en particulier, pour ces régions alpines comme le Dauphiné. Il a réalisé un travail important avec d'autres musiciens sur les traditions de violon populaire de sa région : Les violons du rigodon, Rigodon sauvage, Drailles, Rural café... 

Patrick Mazellier nous offre un document essentiel, accompagné d’un CD, qui va servir à poursuivre la diffusion de ces musiques qu'il travaille depuis les années 1970. À chaque page correspond l'une des 35 mélodies notées en partitions et complétées par une présentation de l'origine de chaque pièce, le tout agrémenté de splendides photographies de ces musiques en situation. Le répertoire est classé par style : polkas, bourrées, scottishs, mazurkas, marches, farandoles, valses, rondes, rigodons (bien sûr), contredanses, aubades (très important pour les répertoires des violoneux), vires (répertoires originaux très peu connus). 

Cançons del Cap del Pont - chronique livre et CD

Voici ici une double publication qui fera certainement date, car elle est à même d'enrichir la connaissance et la pratique du chant en Haut-Languedoc ; elle comprend d'une part un livre contenant plus de deux cents items, dont de nombreux inédits, et d'autre part un disque reprenant vingt-deux chants du recueil.
Passionné d'histoire et de culture populaire, le maire Gabriel Soulages prit soin de noter une grande quantité de chants et autres formes orales, tels que des rondes et chants à danser, des chants politiques, rituels ou religieux, des chants d'amour ainsi que des formulettes, des jeux, des petits contes, etc.

jeudi 27 février 2014

Quand les violons dansent et que les ornements dialoguent, cela inspire Philippe Sahuc qui nous fait partager ses inspirations poético-linguistiques. Côté chronique, Luc Charles-Dominique se livre à une présentation croisée de deux publications autour de chanteurs corréziens et de chansons des pays de l'Ardèche ; Éline Rivière propose son analyse de La Trotteuse, le premier album des Poufs à cordes. Enfin, la rubrique « Retour sur...» s’enrichit et vous propose de découvrir, ou de redécouvrir, le dossier Le chant dans les Landes, écrit par Jacques Baudoin pour le Pastel 66.

Bonne lecture !



Lo Saüc - chronique bilingue

par Philippe Sahuc

Vin o lop ?
Embriaguesa o feror ? Per lo saber, cal tornar amb la memòria alas (!) jornadas del patrimoni, al còr del COMDT, en setembre passat…
Ausissèm un son que sembla una trena de perfeccion. Es un genre de voluta (la fantasiá de violon se sarra) que nos podèm figurar pujar fins al cèl (pasmens pas un cello). Pujar ? Benlèu mai s'envolar… s'enviolonar !
Mès vesèm tanben dus còses provesits d'instruments, que l'un vira, l'autre se ten pès tancats, l'un tòca l'autre, l'autre desfugís l'un…
Nos podèm demandar se n'i a sèti per dus, se l'un va pas passar per l'autre, se l'autre va pas engolir l'un. Tenèm benlèu aici lo resson de l'idèa de partiment, benlèu de paratge. Mès benlèu tanben de la concurréncia, a mossegada aguda mès, calfada, que se pòt far fusion…
Oc pé, lo vesèm ! e vesèm tanben l'esperit del son que non se fa solament amb las partidas actantas del còs, aquelas que fixan e manejan l'instrument, mès amb lo còs entièr, que comprenèm que n'i a pas mai de termièra entre musica e dança. Per violons e violonaires, tot se fa amb lo còs-còrda e tanben : l'arma.

Vie au long ?
Ivresse ou fureur ? Pour trancher, il faut revenir par la mémoire à elles, (ailes ?) les journées du patrimoine, au cœur du COMDT, en septembre dernier…
Nous y entendons une musique qui paraît une tresse parfaite. C'est un genre de volute (le concept de violon s'approche) que nous pouvons nous imaginer grimper jusqu'au ciel (pourtant pas un cello). Grimper ? Peut-être plutôt s'envoler… s'envioloner !
Mais nous y voyons aussi deux corps munis d'instruments, dont l'un tourne, l'autre se tient pieds joints, l'un touche l'autre, l'autre évite l'un…
On peut se demander s'il y a bien de la place pour deux, si l'un ne va pas traverser l'autre, si l'autre ne va pas avaler l'un. On saisit peut-être ainsi l'écho de l'idée de partage, de parité peut-être. Mais aussi de celle de concurrence, a coups de dents aigus mais, une fois chauffée, qui peut atteindre le point de fusion…
Eh oui, on le voit ! et on voit aussi l'esprit de la musique qui ne se fait pas seulement avec les parties agissantes du corps, celles qui tiennent et manipulent l'instrument, mais avec le corps entier, au point que nous comprenons qu'il n'y a plus de frontière entre musique et danse. Pour les violons et les violoneux, tout se fait avec le corps-corde et aussi : l'âme.

Henri et Marie Rouland, chanteurs corréziens et Apprends-moi ton langage, Chansons des pays de l’Ardèche - chroniques

Livret Chants de l'Ardèche
À la fin des années 1970 et dans le courant de la décennie 1980, fut entreprise en France une collecte de grande ampleur auprès des détenteurs de la mémoire musicale et chorégraphique orale, témoins appartenant à la génération 1900 ou, pour les plus jeunes, à la génération suivante (1920-1930). Ces collectes qui, schématiquement, constituèrent la troisième grande vague de recueil de la tradition musicale orale française (après la romantique et celle de l’ethnomusicologie institutionnelle et muséale), permirent de constituer une immense mémoire sonore et visuelle, aujourd’hui conservée essentiellement dans les associations de musiques et danses traditionnelles ou dans quelques structures institutionnelles de conservation de la mémoire. Une autre de leur particularité fut d’avoir été menées en grande partie par des gens qui n’avaient pas de formation particulière en ethnomusicologie et puisaient leur motivation dans des considérations fonctionnelles et utilitaristes : alimenter et renouveler le répertoire des groupes dans lesquels ils jouaient, compléter les seules sources auxquelles ils avaient alors accès, à savoir les anthologies de chants populaires publiées à l’époque romantique et post-romantique. Christian Oller, au cœur de ces deux publications, musicien du fameux et emblématique groupe Le Grand Rouge (Pierre Imbert, Éric Montbel, Olivier Durif et Christian Oller), explique dans le livret de l’album Henri et Marie Rouland, chanteurs corréziens, qu’ « au départ, il s’agissait principalement de collecter des airs originaux pour abonder le répertoire de notre groupe. La démarche fut donc d’aller voir ce qui pouvait subsister en la matière : c’est avec de sages résolutions et – il faut bien le dire – peu de connaissances que nous sommes partis sur ce terrain, sans aucune intention identitaire, régionaliste ou folklorique ».

La Trotteuse, Les Poufs à cordes - chronique CD

Le Sauvage et le Subtil 


Le premier CD des Poufs à Cordes (Clémence Cognet, Noëlie Nioulou) intitulé La Trotteuse nous prend dans une mécanique bien rôdée pour la danse et les oreilles.
Les deux musiciennes nous embarquent pour une traversée musicale qui voyage dans les entrailles du temps, en passant par J.S. Bach jusqu’à aujourd’hui, avec des compositions récentes. Le socle de ce voyage musical est la musique traditionnelle d’Auvergne et du Limousin, qui puise dans les sources, faisant émerger des noms comme Peyrat, Mouret, Perrier, puis Durif et Michel Nioulou. Le ton de cet ancrage au territoire est donné d’emblée par l’allure d’un digipack aux suggestions volcaniques d’une Auvergne qui ne dort pas et par la présence importante du jeu de pieds, enregistré très finement par Aurélien Tanghe, musicien hors pair et magicien du son.

Retour sur... le dossier Le chant dans les Landes

Cliquez ici pour lire et télécharger le dossier
in Pastel 66 2e semestre 2010

par Jacques Baudoin



jeudi 23 janvier 2014

Le 29 novembre dernier les IIe Conversations musicales s'ouvraient avec une table ronde sur l'ornement ou l'art de l'éloquence, Lucie Behr, étudiante en musicologie, était présente et vous livre sa synthèse ; coups de projecteurs sur l'Armoire Bleue (Clémence Cognet, Eric Desgrugilliers et Jacques Puech) par Franck Ferrero et sur Stéréophonies de Virginie Basset par Dominique Regef, CD qui ont marqué nos chroniqueurs ; enfin, retrouvez dans un nouvel espace les numéros épuisés de Pastel à consulter ou à télécharger.


Bonne lecture !

Conversations musicales (II) - Table-ronde : l’ornement ou l’art de l’éloquence

par Lucie Behr, étudiante en musicologie

L’ornement nous a rassemblés à nouveau cette année lors des Conversations musicales, IIe rencontres des musiques anciennes et traditionnelles organisées par le COMDT en collaboration avec le CRR de Toulouse, l’Espace Croix-Baragnon, l’ARPA et l’Ensemble Organum - CIRMA. La question de l’ornementation touche en effet musiciens et chercheurs. Ainsi, étaient présents pour nous guider lors de cette table-ronde : Marcel Pérès, fondateur notamment du CIRMA (Centre Itinérant de Recherche sur les Musiques Anciennes) à l’Abbaye de Moissac et directeur de l’Ensemble Organum, Pascal Caumont, directeur artistique de Vox Bigerri et professeur du département des musiques de l’oralité au conservatoire de Tarbes, Yves Rechsteiner, organiste et claveciniste, professeur de basse continue et responsable du département des musiques anciennes au CNSMD de Lyon, Odile Edouard, violoniste et chargée de la classe de violon baroque du CNSMD de Lyon, Xavier Vidal, violoniste et professeur-coordinateur du département des musiques traditionnelles au Conservatoire à Rayonnement Régional de Toulouse, et, en tant que modérateur, Jean-Louis Comoretto, chanteur, membre de l'ensemble Scandicus et directeur de l’ARPA Midi-Pyrénées. Pour cette deuxième édition, la séance s’est tenue à l’Espace Varèse au CRR de Toulouse et était animée par le même esprit de rencontre des musiques traditionnelles et anciennes ; une rencontre également des auditeurs présents et des intervenants, qui nous ont proposé une réelle discussion autour de la question de l’ « art de l’éloquence » dans la musique vocale et instrumentale.

L'Armoire Bleue - chronique CD

On m’a confié la chronique du CD dénommé L’Armoire Bleue, et, à la première écoute, ce qui m’a le plus frappé, c’est la dynamique des interprétations et l’efficacité musicale.

Dans un second temps je me suis posé les questions suivantes : Qu’est-ce qui de façon générale dans ce projet confère à l’ensemble un sentiment d’appartenance à un espace et une telle homogénéité d’ambiance ? Comment la matière musicale est-elle travaillée à partir des sources que revendiquent  les interprètes sur la pochette (Léon Peyrat, Antoine Chabrier, Alfred Mouret etc.) ?
Le montage des pistes (souvent par suites) amène l’auditeur de façon crescendo à un « sommet » d’écoute et se conclut souvent par une coda « sèche » le laissant dans l’attente de la pièce suivante.

Stéréophonies, Virginie Basset - chronique CD

Un violon, une contrebasse - les deux pôles extrêmes des cordes frottées - c'est un vaste paysage qui se dessine, une stéréophonie en grandeur nature, un contraste radical, un équilibre audacieux entre opposition et fusion.

Virginie Basset vient du classique : formée au conservatoire de Toulouse, elle découvre les musiques traditionnelles d'Auvergne en même temps que celles d'Orient, et ça aussi, c'est une sacrée stéréophonie !
Les rapports entre classique et traditionnel ont toujours été tendus, voire conflictuels, dans ce pays cartésien, parfois jusqu'au dogmatisme, qu'est la France.
Néanmoins cela alimente de joyeuses plaisanteries : "Enlevez la partition à un classique, il s'arrête de jouer ; mettez une partition à un trad, il s'arrête de jouer !"